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INTRODUCTION

Extrait du livre « Travailler avec les cinq obstacles », Ajahn Thiradhammo.

Le thème de ce livre est : comment travailler avec (9) les Cinq Obstacles (mentaux) ou nīvarana. De ce fait, il s’adresse peut-être plus particulièrement aux personnes qui ont une certaine expérience de la méditation, qui se sont trouvées dans une certaine mesure face à ces cinq « obstacles », entraves ou nuisances, et qui aimeraient savoir comment les gérer.

Ces obstacles apparaissent souvent dans la vie de tous les jours mais, dans le contexte bouddhiste, ils figurent très clairement dans la pratique de la méditation – ou entraînement de l’esprit – dans un sens négatif. Ainsi, pour s’assurer une vie paisible et un approfondissement régulier de la méditation, le travail sur les obstacles est, à n’en pas douter, extrêmement utile. Peut-être ne les avez-vous pas encore tous rencontrés en chemin mais attendez un peu et vous verrez ! Ce sont très concrètement des « obstacles mentaux » dans le sens où ils entravent le développement de l’esprit ; ils le distraient et le perturbent, ils peuvent même le posséder ou l’obséder. Ils empêchent l’esprit d’entrer dans un état qui ouvre sur une concentration plus profonde, une vision plus claire des choses, une prise de conscience de la réalité. Lorsqu’ils pratiquent la méditation, même en utilisant de nobles thèmes comme « les quatre demeures divines »(10), les méditants se retrouvent presque toujours face aux réalités concrètes de notre condition humaine ordinaire telles qu’exemplifiées par ces obstacles mentaux.

Les Cinq Obstacles sont mentionnés dans les Écritures dans plusieurs contextes différents. Il est dit que ces « empêchements, obstacles ou entraves de l’esprit arrivent à vaincre la sagesse » (S.V,96), qu’ils « rendent aveugle, sont la cause d’un manque de vision juste, d’une ignorance, font obstacle à la sagesse, sont associés à la détresse et ne mènent pas à l’éveil (nibbāna) » (S.V,97). Quand l’esprit est obsédé par les Cinq Obstacles, on « ne comprend pas ou on ne voit pas tel qu’il est son propre bien-être, le bien-être des autres ni celui de chacun » (A.III,230), on « ne peut pas connaître ou voir les choses telles qu’elles sont réellement » (M.I,323) et ils produisent un manque de connaissance et de vision juste (S.V,127). Si on médite avec un esprit obsédé par les obstacles, on « dé-médite » – ce qui n’est pas une forme de méditation louée par le Bouddha (M.III,13). Dans une célèbre image, le Bouddha compare ces obstacles aux impuretés de l’or : ce n’est qu’une fois débarrassé de ses impuretés que l’or peut être travaillé. De même, c’est lorsque l’esprit est libéré de ces obstacles qu’il devient « malléable, pratique, lumineux, souple et dûment concentré pour l’éradication des poisons [engendrés par la croyance erronée en un ‘moi’]» (A.III,16). Celui qui comprend que les obstacles polluent l’esprit et qui les abandonne est appelé « un noble disciple de grande sagesse, de vaste sagesse, qui sait à quoi il doit s’appliquer, doté d’une sagesse absolue » (A.II,67). Lorsque les obstacles sont abandonnés, il est possible de « réaliser une excellence surhumaine en termes de connaissance et de vision, laquelle est caractéristique des nobles êtres », de même que lorsqu’une rivière est poussée par un courant fort et que quelqu’un bloque les canaux d’irrigation, le courant ne se disperse pas et la rivière continue à couler loin et avec force (A.III,64). 

Quand ces obstacles sont éliminés, c’est comme si on se libérait d’une dette, que l’on guérissait d’une maladie, que l’on était libéré de prison ou de l’esclavage et que l’on se retrouvait en lieu sûr (D.I,73).

Les obstacles peuvent aussi être une grande source de connaissance de soi, de la nature du moi qui les a engendrés. Les êtres humains sont sujets à une grande variété de pollutions mentales et de souffrances. Acquérir une certaine capacité à traverser ces obstacles sera une immense aide pour dépasser toutes sortes d’autres entraves.

En effet, si nous explorons ces obstacles en profondeur jusqu’à leur source dans le « moi », nous pouvons découvrir la cause racine de la souffrance qui, une fois lâchée, débouche sur la libération de l’éveil.

(9) L’auteur explique qu’il parle de travailler « avec »les obstacles plutôt que « sur » les obstacles parce qu’en général nous avons tendance à penser que nous devons nous en débarrasser alors qu’il s’agit en réalité de les pénétrer avec attention et sagesse pour les comprendre.

(10) Les quatre « demeures divines » sont la bienveillance, la compassion, la joie empathique et l’équanimité.

Source du texte   Dhamma de la forêt