Le don du Dhamma surpasse tous les autres dons

Il y a une pratique méditative qui est particulièrement utile pour évaluer les obstacles : la méditation de l’amitié bienveillante ou mettā bhavana.

Pour la plupart d’entre nous, le simple concept d’« obstacle » a des connotations négatives qui engendrent une attitude d’aversion et de rejet. Il est cependant nécessaire d’apprendre à connaître de près les obstacles pour pouvoir travailler sur eux avec sagesse. Concrètement, cela signifie apprendre à être ami avec eux, à les accueillir avec douceur, à y être réceptif.

La méditation mettā est tout spécialement recommandée pour travailler avec l’obstacle de la négativité (voir plus loin le chapitre sur l’aversion et les instructions détaillées pour la pratique). Cependant, elle est très bénéfique pour nous aider à affronter tous les obstacles et toute expérience négative, difficile ou douloureuse. La pratique de mettā est généralement présentée dans le contexte de la méditation samatha qui développe le calme jusqu’au niveau de l’absorption. Pour la vision pénétrante, il est également bon d’avoir une attitude générale de bienveillance.

On cultive la bienveillance comme on cultive une amitié : on commence par une attitude amicale renforcée par une pensée bienveillante, le souhait que tout aille bien pour l’autre. Un ami est quelqu’un que nous connaissons bien, qui nous est familier et avec qui nous sommes détendus et à l’aise. Cette attitude nous permet de nous rapprocher davantage des obstacles, de nous y ouvrir et de les connaître plus en profondeur. En général, nous ne sommes pas très à l’aise avec eux. Peut-être avons-nous eu de mauvaises expériences à cause d’eux, peut-être les voyons-nous comme mauvais ou inquiétants, peut-être en avons-nous peur… Mais si nous ne sommes pas à l’aise avec eux, comment allons-nous réussir à les connaître ? Ainsi, pratiquer activement la bienveillance peut nous aider à nous familiariser avec eux. Bien sûr, nous savons que cette relation sera sans cesse à renouveler puisque tout change constamment, alors pourquoi ne pas établir une relation basée sur l’amitié et voir où cela nous mène ?

La pratique de mettā est particulièrement efficace pour venir à bout de nos attitudes négatives habituelles et pour découvrir des aspects de nous-mêmes sous un nouvel éclairage. Nous réussirons ainsi à ne pas juger ces obstacles aussi négativement mais peut-être même aussi à les voir plus positivement, comme une source de connaissance, comme une occasion de découvrir en profondeur la nature de notre « moi ».

Par exemple, au lieu de détester notre négativité, avec une approche bienveillante (et peut-être aussi un dialogue délicat), nous pourrons découvrir à quel besoin impérieux du « moi » elle répond et nous pourrons ensuite démêler cette partie du complexe du « moi ».

Un ancrage sage et stable dans la générosité, la moralité et la méditation nous permet d’accéder aux aspects de notre être auxquels nous sommes généralement fermés et hostiles. On pourrait dire que développer une conscience des obstacles est une ouverture sur cette facette oubliée, cette facette la plus cachée de notre être. Le paradoxe est que c’est seulement en nous y ouvrant que nous pouvons vraiment les affronter.

Si nous n’y accédons pas, si nous n’en sommes pas conscients, ils sont littéralement « en nous ». Nous nous identifions à eux inconsciemment, nous croyons qu’ils sont « moi », nous nous en saisissons au point de leur donner vie en nous. Mais quand nous en sommes conscients, c’est comme si nous les extirpions de nous en les voyant comme des objets plutôt que des sujets : « Tiens, voilà l’aversion ! Et voilà le désir. Salut ! »

Au lieu qu’ils soient enfouis en nous et qu’ils se manifestent inconsciemment, notre prise de conscience élimine leur rôle de sujets. Ils sont désormais à découvert.

Nous sommes celui qui les voit, qui les reconnaît au lieu d’être manipulé par eux et d’exister à travers eux.

Source du texte   Dhamma de la forêt