Dhamma et non-dualité
Vénérable Bhikkhu Bodhi traduit de l'anglais par Dominique Trotignon texte paru in Buddhist Publication Society (c) Newsletter (numéros de 1994 et 1995) La version originale de ce texte, ainsi que de très nombreux autres textes issus du canon pâli ou des essais sur le bouddhisme Theravâda sont accessibles sur le site "Access to Insight"
plan du texte :
ces divisions ont été établies par le traducteur
- Préambule
- La non-dualité selon le Vedanta
- La non-dualité et l’enseignement du Bouddha
- Ne pas sacrifier la réalité !
- Quelques différences majeures entre Theravâda et Mahâyâna :
- Conclusion
Préambule
Un des défis les plus importants que le bouddhisme Theravâda ait eu à relever ces dernières années a été la confrontation de la méditation Vipassana, telle qu’elle est pratiquée dans l’école Theravâda, avec les traditions contemplatives “non-dualistes”, principalement représentées par l’Advaita Vedanta et le bouddhisme Mahâyâna. Les réactions y ont souvent été extrêmes, depuis l’opposition radicale sur tous les points jusqu’aux tentatives de synthèse et d’hybridation.
Bien que ce présent essai ne puisse prétendre résoudre tous les problèmes, complexes et subtils, impliqués par ce dialogue parfois explosif, j’espère qu’il contribuera au moins à apporter quelques lumières sur la perspective du Theravâda, telle qu’elle se présente dans le Canon pâli.
Je souhaiterais d’abord insister sur le fait qu’une pratique méditative ne constitue pas une discipline isolée et auto-suffisante. N’importe quel système authentique de pratique spirituelle est inscrit dans un fonds conceptuel qui définit, d’une part, les problèmes que la pratique est destinée à résoudre, d’autre part, le but vers lequel elle tend. Aussi la fusion de techniques fondées sur des cadres conceptuels incompatibles est-elle risquée.
Quand bien même de telles fusions pourraient être utiles – contre une certaine tendance à l’expérimentation ou à l’éclectisme – leur effet à long terme risque de produire une “dissonance cognitive” dont les répercussions se feront sentir jusqu’aux niveaux les plus profonds de la psyché et entraîneront une confusion plus grande encore.
Je voudrais aussi rappeler très simplement que les traditions spirituelles non-dualistes sont loin d’être en accord les unes avec les autres, et qu’elles présentent même une grande variété de points de vue, profondément différents et, bien évidemment, influencés par les grandes lignes conceptuelles des philosophies auxquelles elles se réfèrent.
La non-dualité selon le Vedanta
Pour le Vedanta, la non-dualité (advaita) signifie l’absence de toute distinction finale entre l’Atman, le moi le plus intime, et Brahman, la réalité divine, la réalité fondamentale du monde. Du point de vue de la réalisation la plus élevée, il n’existe qu’une seule réalité ultime – qui est simultanément Atman et Brahman – et le but de la recherche spirituelle est de savoir que son propre moi véritable, l’Atman, est cette réalité éternelle qui est Être, Conscience, Bonheur. Puisque toutes les écoles bouddhistes rejettent l’idée de l’Atman, aucune ne peut accepter ce non-dualisme du Vedanta.
Dans une perspective Theravâdin, toute recherche qui vise la découverte d’un Soi – en tant que Soi individuel permanent ou en tant que Soi universel absolu – doit être écartée comme relevant de l’Illusion, erreur métaphysique née d’un défaut de compréhension juste de la nature de l’expérience concrète. Selon les Sutta pâli, l’être individuel est simplement une unité complexe de cinq agrégats, qui sont tous marqués du sceau de l’impermanence, de la souffrance et de l’inexistence du Soi.
Postuler l’existence d’un Soi, en regard de ce composé de phénomènes passagers et conditionnés, est l’exemple même d’une “vision personnaliste” (sakkayaditthi), qui constitue le lien le plus fondamental emprisonnant les êtres dans le cycle des renaissances. Pour le bouddhisme, la libération ne s’obtient pas par l’actualisation d’un Soi véritable ou d’un “Je” absolu, mais par la dissolution, jusque dans ses manifestations les plus subtiles, de toute idée de Soi à propos des cinq agrégats, “la destruction de toute construction du Moi, du Mien et des tendances fondamentales de la conception”.
La non-dualité et l’enseignement du Bouddha
Les écoles du Mahâyâna – en dépit de leurs grandes différences – s’entendent pour soutenir une thèse qui, du point de vue du Theravâda, est à la limite du scandaleux ! Il s’agit de l’affirmation qu’il n’existe aucune différence ultime entre le samsara et le Nirvana, le pur et l’impur, l’ignorance et l’éveil. Pour le Mahâyâna, l’éveil – qui constitue le but que tout bouddhiste doit réaliser – consiste justement à réaliser cette perspective non-dualiste. La validité des dualités conventionnelles est niée, parce que la nature finale de tous les phénomènes est la vacuité, l’absence de réalité substantielle ou intrinsèque. Et, dans cette vacuité, l’ensemble des phénomènes divers et apparemment opposés, posés en principe par la doctrine bouddhiste traditionnelle, coïncident finalement : “tous les dharmas ont une même nature, qui est absence de nature”.
L’enseignement du Bouddha, tel qu’il est conservé dans le Canon pâli, non seulement ne soutient aucune philosophie non-dualiste que ce soit mais, de plus, ne permet de découvrir aucune perspective non-dualiste, même implicite, dans ses discours. Dans le même temps, cependant, je ne soutiendrai pas que les Sutta pâli proposent un dualisme ou posent la dualité comme une hypothèse métaphysique appelant un assentiment intellectuel. Je dirais que l’intention du Bouddha, telle qu’elle apparaît dans le Canon, est bien davantage pragmatique que spéculative, même s’il faut préciser que ce pragmatisme ne fonctionne pas dans une sorte de vide philosophique, puisqu’il trouve ses racines dans la nature de la réalité, telle que le Bouddha en a fait l’expérience lors de son éveil.
Contrairement aux systèmes non-dualistes, la démarche du Bouddha ne vise pas la découverte d’un principe d’unification, derrière ou sous notre expérience du monde. Au contraire, elle prend comme cadre et point de départ le fait très concret d’une expérience vivante, dans son extrême confusion, faite de contrastes et de tensions, dans laquelle elle tente de diagnostiquer le problème central, situé au coeur même de l’existence humaine, et d’offrir une voie pour sa résolution. Le but de la démarche bouddhiste n’est donc pas une unité finale mais l’extinction de la souffrance, résolution du dilemme existentiel à son niveau le plus fondamental.
Lorsque nous observons notre expérience au moment même où elle se présente, nous découvrons qu’elle est imprégnée, de façon critique, d’un grand nombre de dualités, dont les conséquences seront importantes pour notre quête spirituelle. L’enseignement du Bouddha, tel qu’il est conservé dans les Sutta pâli, fixe résolument notre attention sur ces dualités et considère leur appréhension comme la base indispensable à toute recherche honnête de la sagesse de libération. Ce sont précisément ces oppositions – de bien et du mal, de souffrance et de bonheur, de connaissance et d’ignorance – qui font de la recherche de l’éveil et de la délivrance une affaire cruciale et vitale.
Ne pas sacrifier la réalité !
Au sommet de ces paires d’opposés se trouve la dualité du conditionné et du Non-conditionné : le samsara – ronde incessante des naissances et des morts où tout est impermanent, soumis au changement et sujet à la souffrance – et le Nirvana – état de délivrance ultime, non-né, non soumis à la vieillesse ni à la mort. Bien que le Nirvana, dès les textes les plus anciens, soit présenté en définitive comme une réalité ultime – et non simplement comme un état psychologique ou moral – il n’existe pas la moindre allusion au fait que, d’un point de vue métaphysique, cette réalité ne puisse être distinguée, à un certain niveau de profondeur, de son strict opposé, le samsara. Au contraire, le Bouddha n’a cessé d’enseigner que le samsara est le royaume de la souffrance, gouverné par l’avidité, la haine et l’illusion, où nous versons plus de larmes que les océans ne contiennent d’eau, tandis que le Nirvana est la délivrance ultime du samsara, que l’on atteint par la destruction de l’avidité, de la haine et de l’illusion, ainsi que par le renoncement à l’existence conditionnée.
Ainsi le Theravâda fait-il de l’opposition du samsara et du Nirvana le point de départ de toute recherche de la délivrance. Plus encore, il considère que cette opposition détermine l’objectif final puisqu’il s’agit précisément de transcender le samsara pour atteindre la libération dans le Nirvana. Là où le Theravâda diffère de manière significative des écoles du Mahâyâna – qui débutent elles aussi par la dualité du samsara et du Nirvana – c’est lorsqu’il refuse de considérer cette polarité comme une leçon uniquement préparatoire pour ceux qui disposeraient de facultés insuffisantes, devant éventuellement être dépassée dans une réalisation supérieure de la non-dualité. Du point de vue des Sutta pâli, même pour le Bouddha et les Arahant, la souffrance et son extinction, le samsara et le Nirvana, restent distincts.
Les chercheurs spirituels qui ont étudié jusqu’à présent les différentes traditions contemplatives sont généralement partis du principe que la recherche spirituelle la plus élevée posait une unité métaphysique comme point de départ philosophique et comme objectif final de la quête de l’éveil. Faisant de ce présupposé un axiome, ils en concluent que l’enseignement bouddhiste des Sutta pâli – qui insiste sur une froide constatation de ces dualités – est insuffisant ou provisoire et demande à être dépassé au profit d’une réalisation de la non-dualité. Pour ceux qui font preuve d’une telle inclination, la résolution des dualités au sein d’une unité finale est toujours apparue comme plus profonde et plus complète.
C’est justement contre un tel présupposé que je veux m’élever. J’affirmerais, en prenant pour référence l’enseignement originel du Bouddha lui-même, que la profondeur et la perfection n’ont pas besoin d’être achetées au prix des distinctions, qu’elles peuvent être réalisées à leur plus haut niveau en préservant intactes les dualités et la diversité, d’une manière tout à fait évidente, pour faire mûrir la réflexion sur le monde. J’ajouterais, d’ailleurs, qu’un enseignement qui insiste sur la reconnaissance réelle des dualités, au moment même où elles se manifestent, se révèle en définitive bien plus satisfaisant. Il l’est – malgré son refus de l’aspiration de l’esprit à une unité complète – parce qu’il tient compte d’un fait qui dépasse en importance cette quête de l’unité. Ce “quelque chose en plus” c’est la nécessité de rester fondé sur la réalité.
Là où l’enseignement du Bouddha, tel qu’il est préservé dans la tradition Theravâdin, surpasse à mon avis toutes les autres tentatives de résolution des dilemmes spirituels de l’humanité, c’est dans son refus permanent de sacrifier la réalité à l’unité. Le Bouddha-Dhamma ne nous dirige pas vers un absolu qui embrasse tout, dans lequel les tensions de la vie quotidienne se dissolveraient en une unité métaphysique ou une vacuité impénétrable. Il nous dirige plutôt vers la réalité même, comme sphère ultime de compréhension, vers les “choses telles qu’elles sont” (yathabhuta). Par-dessus tout, il nous dirige vers les Quatre Nobles Vérités de la souffrance, de son origine, de sa cessation et du chemin qui mène à sa cessation, affirmation libératoire des choses telles qu’elles sont. Ces Quatre Vérités, énoncées par le Bouddha, sont des Vérités Nobles ; et elles le sont précisément parce qu’elles sont réelles, sans détour, invariables (tatha, avitatha, anannatha). C’est parce que nous n’avons pas su affronter la réalité de ces vérités que nous avons dû voyager pendant si longtemps dans le cycle du samsara. C’est en comprenant ces vérités exactement telles qu’elles sont que l’on peut atteindre le but véritable de la quête spirituelle : mettre fin à la souffrance.
Quelques différences majeures entre Theravâda et Mahâyâna
Je souhaite maintenant aborder trois domaines majeurs de différence entre les philosophies de la non-dualité et l’enseignement du Bouddha, auquel nous nous référerons ici sous le nom de “Ariyan Dhamma” (le Noble Dhamma). Il s’agit des trois domaines correspondant aux trois divisions de la Voie bouddhiste : moralité, concentration et sagesse (sîla, samadhi, prajna).
1) Sîla – la conduite morale
En ce qui concerne la moralité (sîla), la différence entre les deux traditions n’est pas immédiatement visible, toutes deux affirmant en général l’importance d’une conduite morale au départ de la formation. La différence essentielle entre elles deux apparaît, non pas au commencement mais seulement plus tard, dans la manière qu’elles ont chacune d’évaluer l’importance de la moralité dans les états avancés de la Voie. Pour les systèmes non-duels, toutes les dualités sont finalement dépassées dans la réalisation de la réalité non-duelle, l’Absolu ou fond fondamental. Comme l’Absolu englobe et dépasse toute diversité, pour celui qui l’a réalisé les distinctions entre le bien et le mal, la moralité et l’immoralité, n’ont plus aucune valeur ultime. De telles distinctions – affirment-ils – ne sont valides qu’au niveau conventionnel, non au niveau de la réalisation ultime ; elles intéressent le débutant, non l’adepte confirmé. Les philosophies de la non-dualité, dans leurs écoles historiques – particulièrement dans le tantrisme hindou et bouddhiste – soutiennent que la conduite du sage éveillé ne peut être soumise aux règles morales. Le sage a transcendé toutes les distinctions conventionnelles du bien et du mal. Il agit spontanément en prenant appui sur son intuition de l’Ultime et ne se trouve donc plus soumis aux règles morales toujours valables pour ceux qui luttent encore dans leur recherche de la lumière. Son comportement est l’expression trompeuse et incompréhensible de ce que l’on a appelé la “folle sagesse”.
Pour l’Ariyan Dhamma, la distinction entre les deux types de conduite, morale et immorale, est stricte et claire, et cette distinction demeure valable tout au long du cheminement qui mène à la réalisation finale de la Voie : “La conduite corporelle est de deux sortes, je le dis, celle qui doit être cultivée ou celle qui ne doit pas être cultivée, et une telle conduite ne peut être que l’une ou l’autre” (Majjhima Nikaya, 114). La conduite du sage bouddhiste idéal, l’Arahant, incarne nécessairement les niveaux les plus élevés de la droiture morale, dans l’esprit et dans la lettre, et, pour lui, la conformité dans la lettre est naturelle et spontanée. Le Bouddha déclare que celui qui est libéré suit les règles du Vinaya car il perçoit le danger résidant dans les moindres manquements. Il ne peut intentionnellement commettre aucune infraction vis-à-vis des préceptes moraux, ni vouloir non plus engager aucune sorte d’action qui soit motivée par le désir, la haine, l’illusion ou la crainte.
2) Samadhi – la concentration de l’esprit
Dans la pratique de la méditation ou concentration (samadhi), nous trouvons de même une différence très nette de perspective entre les systèmes non-duels et l’Ariyan Dhamma. Pour les systèmes non-duels, en effet, les distinctions sont, au niveau ultime, irréelles ; la pratique de la méditation n’est pas explicitement orientée vers l’arrêt des souillures mentales et la culture d’états d’esprit vertueux. Dans ces systèmes, il est souvent dit que les souillures ne sont qu’apparences, exemptes de réalité intrinsèque, voire des manifestations de l’Absolu. S’engager dans un programme de pratique visant à les maîtriser est alors considéré comme un exercice futile, comme le serait fuir devant une apparition démoniaque : chercher à éliminer les souillures mentales ne ferait que renforcer l’illusion de la dualité. Les thèmes de méditation qui “serpentent” à travers les courants de pensée non-duels affirment : “il n’est ni souillure ni pureté” ; “les souillures, par essence, sont semblables à la sagesse transcendante” ; “c’est par la passion que l’on vainc la passion”.
Selon l’Ariyan Dhamma, la pratique de la méditation se présente, du début à la fin, comme un processus de purification mentale. Le processus commence par l’identification des dangers dans les états malsains : il s’agit de réels polluants de notre être qui doivent être réprimés et éliminés. L’accomplissement est atteint par la complète destruction des souillures grâce à la culture de leurs antidotes sains. Le cours entier de la pratique exige donc la reconnaissance des différences entre les qualités lumineuses et sombres de l’esprit, et développe l’effort et l’assiduité : “On ne doit pas tolérer le surgissement d’une pensée malsaine, on l’abandonne, on la dissipe, on la supprime, on l’annule” (Majjhima Nikaya, 2). Les obstacles sont “causes de l’aveuglement, causes de l’ignorance, destruction de la sagesse et ne conduisent pas au Nirvana” (Sammyutta Nikaya 46, 40). La pratique de la méditation purge l’esprit de ces corruptions, préparant la voie à la destruction de ces impuretés (asavakkhaya).
3) Prajna – la sagesse
Enfin, en ce qui concerne la sagesse (prajna), l’Ariyan Dhamma et les systèmes non-duels s’engagent une fois encore dans des directions opposées. Pour les systèmes non-duels, le rôle de la sagesse est de traverser la diversité des apparences (ou l’apparence de la diversité) dans le but de découvrir la réalité unifiée qui les sous-tend. Les phénomènes concrets, dans leurs distinctions et leur pluralité, ne sont qu’apparence, alors que la Réalité ultime est Une : un absolu substantiel (l’Atman, Brahman, la divinité…), ou un zéro métaphysique (Sunyata, la Nature Vide de l’Esprit, etc.). Pour ces systèmes, la libération est atteinte lorsqu’on parvient à l’unité fondamentale dans laquelle les opposés fusionnent et les distinctions s’évaporent comme rosée au soleil.
Pour l’Ariyan Dhamma, la sagesse vise à observer et à reconnaître les choses telles qu’elles sont (yathabhutananadassana). Aussi, pour connaître les choses telles qu’elles sont, la sagesse doit-elle respecter les phénomènes dans leurs exactes particularités. La sagesse laisse la diversité et la pluralité intactes. Elle cherche plutôt à découvrir les caractéristiques des phénomènes, pour gagner en perspicacité dans l’étude de leurs qualités et de leur structure. Elle ne vise pas une identification complète avec le Tout mais, à travers le désengagement et le détachement, un renoncement au Tout. La culture de la sagesse, en aucun cas, ne “détruit” les phénomènes concrets en les réduisant à des apparences, ne les considère pas non plus comme des fenêtres ouvertes sur un quelconque fond fondamental. Au lieu de cela elle étudie et discerne, afin de comprendre les choses telles qu’elles sont : “Et que comprend celui qui comprend les choses telles qu’elles sont ? Il comprend : ceci est la forme, ceci apparaît et disparaît. Ceci est la sensation… la perception… les formations mentales… la conscience, ceci apparaît et disparaît”. “Lorsque l’on voit ‘ Toutes les formations sont impermanentes, toutes conduisent à la souffrance, toutes sont sans Soi ‘, alors on met fin à la souffrance : telle est la voie de la délivrance”.
Conclusion
Les systèmes spirituels sont reconnaissables autant par les images qu’ils privilégient que par les doctrines qu’ils conçoivent. Deux images sont ainsi particulièrement présentes dans les systèmes non-duels. L’une est l’Espace, qui embrasse tout simultanément et imprègne tout, cependant que rien n’est concret en soi ; l’autre est l’océan, qui demeure toujours identique à lui-même malgré la multitude changeante des vagues qui le compose. Les images employées dans l’Ariyan Dhamma sont extrêmement diverses mais l’un des thèmes qui unit bon nombre d’entre elles est celui de l’acuité de la vision – vision qui discerne clairement et précisément, dans le panorama des formes visibles, chacune d’elles dans son individualité propre :
“C’est comme s’il y avait un lac dans un renfoncement de la montagne, clair, limpide, non troublé, et un homme doué d’une bonne vue debout près du bord pouvant voir les coquillages, les graviers et les cailloux, et les bancs de poissons nageant au fond ou au repos. Il pourrait penser : ‘ Il y a ce lac, clair, limpide, non troublé, et il y a ces coquillages, ces graviers et ces cailloux, et ces bancs de poissons nageant au fond ou au repos ‘. Ainsi un moine comprend la réalité comme ‘ Ceci est douleur, ceci est l’origine de la douleur, ceci est la cessation de la douleur, ceci est le chemin qui mène à la cessation de la douleur ‘. Quand il sait et voit de cette manière, son esprit est libéré des impuretés et, avec la libération de l’esprit, il sait qu’il est parvenu à la libération” (Majjhima Nikaya, 39).
Source : http://www.bouddhismes.net/